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Saint Jean de La Croix
Jean de la Croix est un saint et mystique espagnol. Son nom de naissance est Juan de Yepes, il est né à Fontiveros en 1542 et mort au couvent d'Ubeda en 1591. Il a réformé la branche masculine du Carmel, en développant l'ordre des carmes déchaussés. Il fait partie des grands mystiques espagnols du XVIe siècle, au même titre que Thérèse d'Ávila, dont il fut d'ailleurs le confesseur et l'ami. Tous deux sont au nombre des docteurs de l'Église. Il a été béatifié en 1675, canonisé en 1726 et docteur de l'Eglise en 1926. Fête : le 14 décembre.
Sa vie Fils de Gonzalo de Yepes et de Catalina Alvarez, Juan de Yepes naît en 1542 à Fontiveros en Vieille Castille ; certains historiens avancent l'année 1540. La famille vit du tissage. Le père Gonzalo meurt en 1545, ainsi que son frère Luis. Le reste de la famille connaît alors l'exclusion, l'errance et la misère. En 1551, la famille s'installe à Medina del Campo où elle trouve du travail. Juan fréquente les écoles de la ville, celle des frères de la Doctrine, puis le collège des jésuites, et il travaille à l'hôpital à de multiples tâches. En 1563, à vingt ans, sous le patronyme de Jean de Saint-Matthias, il prend l'habit chez les Carmes. Après l'année de noviciat et la profession religieuse, il part pour Salamanque au collège Saint-André des Carmes accomplir le cycle des études scolastiques. En 1567, il revient quelques jours à Medina pour célébrer sa première messe en présence de ses frères, de sa famille et des amis du couvent. Il rencontre Thérèse d'Avila (1515-1582) qui vient de fonder dans la ville un Carmel de sa Réforme et souhaite entraîner quelques frères dans sa Réforme de l'Ordre Juan pensait alors à la Chartreuse comme lieu plus intense de contemplation, Thérèse l'en dissuade Un an plus tard, en 1568, il inaugure avec deux autres compagnons à Duruelo, une vie de retour aux pratiques primitives de l'Ordre. Très vite, Juan devient formateur de nouveaux membres. Plusieurs nouvelles fondations s'en suivent : Mancera, Pastrana. Thérèse a été envoyée par les autorités de l'Église à l'Incarnation d'Avila, le grand couvent où elle était entrée à vingt ans, pour y introduire sa Réforme. En 1572, elle y fait venir Juan à demeure, avec un autre frère déchaux, surtout pour accompagner spirituellement les moniales. Entre le 2 décembre 1577 et le 17 août 1578, il est alors mis au secret dans le couvent de Tolède par les religieux de l'ordre qui combattent la Réforme. Après son évasion, pour tenter d'apaiser la situation, les frères de la Réforme l'envoient à Jaén dans le sud de l'Espagne. Il accompagne aussi Thérèse dans ses dernières fondations. Il ouvre encore près de l'université de Baeza un collège carmélitain pour les jeunes étudiants de la Réforme. Après la mort de Thérèse en 1582, il devient prieur du couvent de Grenade Là, Juan révèle tous ses dons de maître spirituel et écrivain ; il compose d'autres poèmes et il rédige tous ses grands Écrits ; il montre aussi ses dons de supérieur de communautés de la Réforme. Toujours accompagné d'un frère laïc, à dos d'âne ordinairement, il voyage beaucoup pour encourager les nouveaux couvents de frères et de moniales. En 1589, il est élu prieur du couvent de Ségovie. Alors qu'il a été présent au départ de la Réforme et qu'il en a assumé différentes responsabilités, sauf celle de supérieur provincial, il finit par être marginalisé de nouveau en 1591, chez les Réformés eux-mêmes. Un Chapitre général veut l'envoyer fonder au Mexique ; il se retire dans l'ermitage proche de La Peñuela, le 10 août, porteur d'une fièvre qui ne le quittera plus. Le 28 septembre, il se rend au couvent le plus proche à Ubeda, pour s'y faire soigner. Entouré des frères de la petite communauté, il meurt dans la nuit du 13 au 14 décembre 1591, après avoir demandé au Prieur de lire en guise de prière des agonisants le Cantique des cantiques qu'il avait chanté en lui toute sa vie.
uvres Sa poésie composée en langue castillane, dans les formes du temps, est faite de 999 vers. Ses grandes uvres sont - Les Cantiques spirituels, - La Montée du Carmel, - La Nuit obscure, - La vive Flamme d'amour. Ce sont des commentaires de ses poêmes qui décrivent et rendent compte théologiquement de la progression de l'âme vers l'union avec Dieu. Elles sont considérées comme un des sommets de la mystique chrétienne. D'autres textes plus brefs permettent une connaissance approfondie de sa personne et de son message. (Sources: wikipedia)
Textes de SAINT JEAN DE LA CROIX LA MONTÉE DU CARMEL La Parole de Dieu suffit...... Dans le
chapitre précédent (chapitre 19),
nous avons vu qu'il est contre la volonté de Dieu de
rechercher des connaissances particulières par la voie
surnaturelle des vision, paroles, etc. Nous avons vu, d'autre part,
dans le même chapitre, et d'après les
témoignages de la sainte Écriture que nous y
avons rapportés, que des rapports de cette sorte avec Dieu
étaient permis sous la Loi ancienne. Non seulement ils
étaient permis, mais ils étaient même
commandés; et quand les enfants d'Israël ne lui
obéissaient pas sur ce point, Dieu le leur reprochait. C'est
ce que l'on voit dans Isaïe, où Dieu leur reprocha
vivement de ne l'avoir pas consulté quand ils pensaient
descendre en Égypte, et leur dit Qui ambulatis ut
descendatis in Aegyptum, et os meum non interrogatis:
« Vous ne m'avez pas demandé tout d'abord
ce qui convenait (Is. XXX, 2). »
Nous lisons de même dans Josué que, les mêmes enfants d'Israël ayant été trompés par les Gabaonites, l'Esprit leur rappelle leur faute en ces termes: Susceperunt igitur de cibariis eorum, et os Domini non interrogaverunt: « Ils ont reçu de leurs vivres, et ils n'ont pas consulté le Seigneur (Jos. IX, 14). » Nous voyons encore dans la sainte Écriture que Moïse consultait souvent le Seigneur. Le roi David et tous les rois d'Israël faisaient de même quand une guerre ou quelque difficulté surgissait; telle était aussi la coutume des prêtres et des prophètes de la Loi ancienne. Dieu leur répondait; il s'entretenait avec eux; il ne se fâchait pas; cette manière d'agir avec lui était agréable à ses yeux; si on ne l'eût pas suivie, c'eût été une faute, voilà la vérité. Pourquoi donc maintenant sous la Loi nouvelle, sous la Loi de grâce, ne serait-il plus permis de faire comme alors? A cette question il faut répondre: La cause principale pour laquelle étaient permises sous la Loi ancienne les demandes que l'on adressait à Dieu et pour laquelle il convenait aux prophètes et aux prêtres de désirer des visions et des révélations divines, c'est que la foi n'était pas encore fondée ni la loi évangélique établie. Il fallait que l'on s'adressât à Dieu directement et que Dieu répondît, par des paroles, des visions ou des révélations, par des figures ou des images, ou enfin par beaucoup d'autres manières de nous faire connaître la vérité. Toutes ses réponses, en effet, paroles, oeuvres ou révélations, avaient pour but les mystères de la foi, la concernaient ou s'y rapportaient. Or, les choses de la foi ne viennent pas de l'homme; elles viennent de la bouche de Dieu; il les a exprimées lui-même par sa bouche. Il fallait donc, comme nous l'avons dit, les demander à la bouche même de Dieu. Voilà pourquoi il blâmait les enfants d'Israël qui ne le consultaient pas pour avoir son avis et diriger les faits et les événements vers la foi qu'ils n'avaient pas encore, parce qu'elle n'était pas fondée. Mais aujourd'hui que la foi est fondée sur le Christ et que la loi évangélique est manifestée dans cette ère de la grâce qu'il nous a donnée, il n'y a plus de motif pour que nous l'interrogions comme avant, ni pour qu'il nous parle ou nous réponde comme alors. Dès lors qu'il nous a donné son Fils, qui est sa Parole, il n'a pas d'autre parole à nous donner. Il nous a tout dit à la fois et d'un seul coup en cette seule Parole; il n'a donc plus à nous parler. Tel est le sens de ce texte par lequel saint Paul veut engager les Hébreux à se séparer de ces anciennes pratiques et manières de traiter avec Dieu qui étaient en usage sous la loi de Moïse et à jeter les yeux sur le Christ seulement: Multifariam multisque modis olim Deus loquens patribus in prophetis; novissime diebus istis locutus est nobis in Filio: « Ce que Dieu, dit-il, a révélé à nos pères en divers temps et de diverses manières par l'intermédiaire des prophètes, il l'a dit maintenant et tout à la fois en ces derniers jours par son Fils (Heb. I, 1-2). » L'Apôtre nous donne à entendre par là que Dieu s'est fait comme muet; il n'a plus rien à dire; car ce qu'il disait par parties aux prophètes, il l'a dit tout entier dans son Fils, en nous donnant ce tout qu'est son Fils. Voilà pourquoi celui qui voudrait maintenant l'interroger, ou désirerait une vision ou une révélation, non seulement ferait une folie, mais ferait injure à Dieu, en ne jetant pas les yeux uniquement sur le Christ, sans chercher autre chose ou quelque nouveauté. Dieu pourrait en effet lui répondre de la sorte: Si je t'ai déjà tout dit dans ma parole, qui est mon Fils, je n'ai maintenant plus rien à te révéler ou à te répondre qui soit plus que lui. Fixe ton regard uniquement sur lui; c'est en lui que j'ai tout déposé, paroles et révélations; en lui tu trouveras même plus que tu ne demandes et que tu ne désires. Tu me demandes des paroles, des révélations ou des visions, en un mot des choses particulières; mais si tu fixes les yeux sur lui, tu trouveras tout cela d'une façon complète, parce qu'il est toute ma parole, toute ma réponse, toute ma vision, toute ma révélation. Or, je te l'ai déjà dit, répondu, manifesté, révélé, quand je te l'ai donné pour frère, pour maître, pour compagnon, pour rançon, pour récompense. Le jour où je suis descendu avec mon Esprit sur lui au Thabor, j'ai dit: Hic est Filius meus dilectus, in quo mihi bene complacui, ipsum audite: « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j'ai mis mes complaisances; écoutez-le (Mat. XVII, 5). » Depuis lors, j'ai laissé de côté toutes ces sortes d'enseignements et toutes ces réponses, et je les lui ai remises; écoutez-le, parce que je n'ai plus de foi à vous révéler, ni plus de vérités à vous manifester. Quand précédemment je parlais, c'était pour vous promettre le Christ; quand on m'adressait des questions, c'était des questions qui regardaient la demande et l'espérance du Christ où l'on devait trouver tous les biens, comme le donne à entendre toute la doctrine des Évangélistes et des Apôtres. Mais maintenant si quelqu'un vient m'interroger comme on le faisait alors et me demande quelque vision ou quelque révélation, c'est en quelque sorte me demander encore le Christ ou me demander plus de foi que je n'en ai donné: de la sorte, il offenserait profondément mon Fils bien-aimé, parce que non seulement il montrerait par là qu'il n'a pas foi en lui, mais encore il l'obligerait une autre fois à s'incarner, à recommencer sa vie et à mourir. Vous ne trouverez rien de quoi me demander, ni de quoi satisfaire vos désirs de révélations et de visions. Regardez-y bien. Vous trouverez que j'ai fait et donné par lui beaucoup plus que ce que vous demandez. Si vous désirez que je vous réponde par quelques paroles de consolation, considérez comment mon Fils m'a obéi et a été affligé par amour pour moi, et vous entendrez par combien de paroles il vous répondra. Voulez-vous que Dieu vous explique certains événements mystérieux, ou certaines choses cachées: fixez seulement les yeux sur lui, et vous y trouverez les mystères les plus profonds, les trésors de la sagesse et des merveilles divines qui sont renfermées en lui, comme l'Apôtre le dit: In quo sunt omnes thesauri sapientiae et scientiae absconditi: « En lui sont cachés tous les trésors de la sagesse et de la science de Dieu (Col. II, 3). » Ces trésors de sagesse seront pour vous beaucoup plus profonds, plus doux et plus utiles que tout ce que vous désirez savoir. Voilà pourquoi l'Apôtre se glorifiait en ces termes: « Je n'ai pas donné à entendre que je savais autre chose que Jésus-Christ, et Jésus-Christ crucifié (I Cor. II, 2). » : Non enim judicavi me scire aliquid inter vos nisi Jesum Christum, et hunc crucifixum. Si vous voulez encore d'autres visions ou révélations divines ou corporelles, regardez toujours dans son Humanité, et vous trouverez dans cette Humanité beaucoup plus que vous ne pensez, parce que l'apôtre saint Paul dit encore: In ipso inhabitat omnis plenitudo Divinitatis corporaliter: « En lui habite corporellement la plénitude de la Divinité (Col. II, 9). » Il ne convient donc pas d'adresser à Dieu des demandes de cette sorte; il n'est pas nécessaire qu'il parle encore, car en achevant de nous révéler toute la foi dans son Christ, il n'y a plus d'autre objet de la foi à révéler, et il n'y en aura jamais. Celui qui voudrait recevoir encore par la voie surnaturelle certaines communications surnaturelles semblerait accuser Dieu de ne pas nous avoir donné en son Fils tout ce qui nous était nécessaire, comme nous l'avons dit. Supposé même qu'il agisse ainsi tout en ayant la foi, et en croyant ses enseignements, il manifeste un esprit de curiosité et l'imperfection de sa foi. Ce n'est donc point de cette curiosité qu'il faut attendre un enseignement doctrinal ou une communication par voie surnaturelle. A l'heure où le Christ expira sur la Croix, et dit: Consummatum est: « Tout est consommé (Jean, XIX, 30) », non seulement ont pris fin toutes ces communications surnaturelles, mais encore toutes les cérémonies et tous les rites de la Loi ancienne. Ainsi donc nous devons nous guider en tout d'après la doctrine du Christ Notre-Seigneur, fait Homme pour nous, de son Église, de ses ministres qui nous parlent d'une manière humaine et visible. Par cette voie nous trouverons le remède à nos ignorances et à nos faiblesses spirituelles; par cette voie nous trouverons des secours abondants pour tous nos besoins. Tout ce qui sort de cette voie ou s'en écarte, non seulement est de la curiosité, mais encore une grande présomption. On ne doit rien croire de ce qui vient par voie surnaturelle, si ce n'est, je le répète, l'enseignement de Jésus-Christ fait Homme, et celui de ses ministres qui sont hommes aussi. Cela est tellement vrai que saint Paul a dit: Sed licet... Angelus de caelo evangelizet vobis, praeter quam quod evangelizavimus vobis, anathema sit: « Si quelque ange du ciel venait vous évangéliser autrement que nous, hommes, nous vous avons évangélisé, qu'il soit maudit et excommunié (Gal. I, 8). » Il est donc vrai que nous devons toujours nous en tenir à ce que le Christ nous a enseigné. Tout le reste n'est rien; et nous ne devons pas le croire s'il n'est pas conforme à son enseignement. Il travaille donc inutilement celui qui veut aujourd'hui traiter avec Dieu comme on le faisait sous l'ancienne Loi. D'ailleurs, même alors il n'était pas permis au premier venu d'adresser des demandes à Dieu; Dieu, de son côté, ne répondait pas à tout le monde, mais seulement aux prêtres et aux prophètes; c'est de leur bouche que le peuple devait connaître sa loi et ses enseignements. Et si quelqu'un voulait savoir de Dieu quelque chose, il le demandait par l'intermédiaire du prêtre ou du prophète, et non directement par lui-même. Si parfois David a demandé directement quelque chose à Dieu, c'est qu'il était prophète; or, même alors, il ne le faisait pas sans revêtir l'habit sacerdotal, comme on le voit dans le livre des Rois, où il dit au prêtre Abimélec: Applica ad me ephod: « Donnez-moi l'éphod (I Rois, XXIII, 9). » Et l'éphod était un des ornements les plus importants du pontife, et ce n'était qu'après s'en être revêtu qu'il consultait Dieu. D'autres fois encore, David consultait Dieu par l'intermédiaire de Nathan et des autres prophètes. C'est donc sur la parole des prophètes et des pontifes que l'on devait croire comme venant de Dieu les révélations qui étaient faites, et non point sur le jugement personnel. Ce que Dieu disait alors n'avait donc ni force ni autorité et ne pouvait inspirer une créance absolue tant qu'il n'était pas sanctionné par les pontifes et les prophètes. Dieu, en effet, aime tant à voir l'homme gouverné et dirigé par un autre homme semblable à lui, et selon la raison naturelle, qu'il veut absolument que ce qu'il nous communique surnaturellement nous ne le donnions à comprendre, ou nous n'y donnions entière créance, ou n'ait de force et de sécurité en nous, qu'après avoir passé par ce canal humain de la bouche de l'homme. Chaque fois qu'il dit ou révèle quelque chose à l'âme il le fait en inclinant cette âme à s'en rapporter à qui il convient. Jusqu'alors, il n'a pas coutume de lui donner une pleine assurance sur la révélation; il veut que l'homme la reçoive d'un autre homme semblable à lui.
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